La fin des cookies tiers peut-elle arriver plus vite que prévu ?
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Coup de tonnerre dans le petit monde du digital ! Google renoncerait à mettre fin aux cookies tiers sur Chrome ? Tout le monde s’agite fortement sur LinkedIn depuis hier suite à une communication officielle de Google, et plus particulièrement de l’équipe en charge du projet Privacy Sandbox, expliquant qu’elle renonçait mettre fin aux cookies tiers dans les conditions initialement prévues.
En lisant entre les lignes, la conclusion pourrait-être toute autre. Et si la fin des cookies tiers arrivait plus vite que prévu ?
Avant toute chose, remettons un peu de contexte.
Pourquoi mettre fin aux cookies tiers ?
La volonté affichée derrière la fin des cookies tiers est de préserver la vie privée des utilisateurs en rendant le tracking de leur comportement en ligne plus complexe et surtout moins précis pour les acteurs MarTech tels que les SSP, DSP, adserveurs, solutions d’attribution, … En effet, bien qu’ils n’aient pas été initialement prévus pour cela, les cookies tiers sont très utilisés dans le ciblage publicitaire car ils permettent de suivre le comportement des internautes assez efficacement.
Outre cet effet de communication d’une vertue certaine, la réalité pour Google est un renforcement de sa position dominante sur le marché de la publicité en ligne via davantage de contrôle technologique.
La fin des cookies tiers : quels impacts ?
La fin des cookies tiers est déjà une réalité sur des navigateurs tels que Safari ou FireFox. Que Google Chrome le fasse aussi peut alors sembler pas si incroyable que ça finalement ? Et bien en fait si, car plus de cookies tiers signifie globalement la quasi-fin des fonctionnalités suivantes (en tout cas telles qu’on les a connues jusqu’à présent) :
- Suivi cross-sites
- Ciblage comportemental comme le retargeting ou le lookalike
- Attribution post-impression
Aujourd’hui, de nombreux prestataires de la publicité digitale survivent grâce à Chrome et ses cookies tiers encore actifs sur environ 2/3 des utilisateurs (parts de marché du navigateur dans le monde). Sans cela, leur activité serait en grand péril, les seules portes de sortie étant l’exploitation des ponts technologiques proposés par Google via la Privacy Sandbox ou encore les solutions d’ID unique telles que First-ID ou ID5.
La Privacy Sandbox contestée
Sur le papier, les options proposées par Google dans son projet Privacy Sandbox sont intéressantes. Elles répondent à de nombreux cas d’usages pour maintenir des capacités de ciblages publicitaires assez fines. Vous pouvez consulter mon article sur Topics API pour avoir une idée de ce qui peut être fait.
Pour autant, de nombreux acteurs MarTech ainsi que des autorités en charge de la surveillance des pratiques anti-concurrentielles ont exprimé des doutes, voire de vives critiques à l’encontre du projet :
- Criteo estime que Privacy Sandbox n’est pas encore prêt : https://www.criteo.com/blog/privacy-sandbox-testing-results-show-shortfalls-to-meet-cma-requirements/
- Index Exchange exprime ses craintes sur Privacy Sandbox, notamment sur la mesure et l’attribution : https://www.indexexchange.com/2024/07/02/insights-privacy-sandbox-testing/
- Détails concernant l’enquête de la CMA sur Privacy Sandbox : https://www.gov.uk/cma-cases/investigation-into-googles-privacy-sandbox-browser-changes
Google change de stratégie
Face au rejet du marché concernant les solutions proposées, Google change son fusil d’épaule et a annoncé ne plus souhaiter mettre fin aux cookies tiers de façon unilaterale, mais plutôt de vouloir donner le choix à ses utilisateurs de le faire s’ils le souhaitent.
C’est là que ça devient intéressant car cette phrase reste vague. On ne connait pas la façon dont Google va proposer aux utilisateurs de faire ce choix, il est seulement dit que cela va être discuté avec les organes régulateurs. Pour ma part, je me dis que Google pourrait vouloir prendre les autorités à leur propre jeu en utilisant un choix éclairé de ses utilisateurs comme cheval de Troie. En effet, Google a par exemple été forcé d’afficher une popin sur Chrome pour que chacun puisse choisir son moteur de recherche préféré. On peut alors imaginer que Google mette en place une popin similaire, avec un discours angoissant concernant les cookies tiers et la façon avec laquelle ils peuvent s’introduire dans votre vie privée. Dans un tel contexte, le taux d’opt-out à l’utilisation des cookies tiers (autrement dit le taux d’opt-in à l’utilisation de Privacy Sandbox) pourrait alors vite grimper en flèche.
Affaire à suivre donc. Seul l’avenir nous dira ce que vont réellement devenir les cookies tiers sur Chrome et comment l’écosystème MarTech va s’y adapter.
Vous pouvez consulter l’annonce officielle ici : https://privacysandbox.com/news/privacy-sandbox-update/
Tracking serveur et cookies tiers
Petit aparté sur le tracking server-side, puisque c’est quelque chose que je fais à longueur de journée en tant que Consultant Tracking Freelance pour mes clients (notamment via sGTM, Eulerian ou Commanders Act).
La fin des cookies tiers n’est pas l’unique raison (voire pas du tout en fait) pour utiliser du tracking server-side. Cette annonce de Google ne remet donc aucunement en cause le fait d’avoir ou de vouloir déployer ce type de tracking. En effet, les avantages que cela procure sont décorélés de ce sujet :
- Contournement des adblockers via la proxification des ressources techniques => plus de données collectées
- Allongement de la durée de vie des cookies 1st party sur les navigateurs les limitant => une donnée plus fiable en analyse et en attribution des conversions
- Amélioration de la webperf => moins de scripts sur votre site permet de le charger plus vite
- Enrichissement de vos données via la connexion à d’autres API => peut être utile pour certains use-cases marketing